Love I Obey Rosemary Standley & Helstroffer band Love I Obey Rosemary Standley & Helstroffer band Récital mis en scène, créé en février 2015 à la Scène Nationale 61 à Alençon, puis en tournée (Saint-Médard-en-Jalles, Le Carré Les Colonnes ; Paris, Cité de la Musique ; Arras, Théâtre d’Arras ; Metz, Arsenal de Metz ; Chateaubriant, Théâtre de Verre ; Noisiel, Ferme du Buisson ; Lyon, Chapelle de la Trinité ; Noirlac, Abbaye de Noirlac, etc). Repris en tournée en 2016. Durée 1h Coproduction avec la Scène Nationale 61 et l’Arsenal de Metz avec le soutien de l’ADAMI, du CNV, FCM et de la SACEM. Avec la collaboration des ateliers décors de l’Opéra de Rouen Haute-Normandie. Production déléguée : Madamelune Création Direction musicale : Bruno Helstroffer, Rosemary Standley, Elisabeth Geiger Mise en scène : Vincent Huguet Décors : Vincent Huguet et Anne Muller Costumes : Clémence Pernoud Lumières : Anne Muller Ingénieur du son : Anne Laurin Régie générale : Claire Oliveau Distribution Voix : Rosemary Standley Guitare & Théorbe : Bruno Helstroffer Clavecin et orgue : Elisabeth Geiger Viole de Gambe : Martin Bauer Bugle, serpent : Michel Godard Photos : ©Julie Moulier Programme What If a Day, attribué à Thomas Campion, 1606 The Bob of Dumblane in Orpheus Caledonius, William Thomson, 1733 Bruton Town, d’après le recueil de Cecil J. Sharp Hush You Bye, d’après le recueil de Alan Lomax I Once Loved a Lass, ballade écossaise, vers 1670 Wagoner’s Lad, vers 1850-1875 Jack Hall, chanson traditionnelle du Somerset O Death, chanson de l’époque des Tudor, attribuée à Anne Boleyn, 1536 Pastime, attribuée à Henry VIII Echoes, Bruno Helstroffer / A Hymn to the Evening, poème de Phillis Wheatley An Evening Hymn, Henry Purcell, 1659-1695 I Love a Lass, John Wilson, 1595-1674 Geordie, chanson montagnarde américaine du folklore traditionnel anglo-irlandais Poor Wayfaring Stranger, chanson traditionnelle du début du xixe siècle Love I Obey, William Lawes, 1602-1645 Note sur la mise en scène par Vincent Huguet « Combien de navires voguent dans la forêt ? » La première fois que j’ai écouté la maquette de Love I Obey, j’ai cru entendre des mélodies de la Renaissance, chantées au coin du feu dans un vieux château en Irlande par une Mélisande dévorée des yeux par des musiciens qui rêvent de départs, d’horizons lointains… et peut-être de la douceur de sa peau. Comme un fado élisabéthain, une musique à la fois précieuse, poétique, et chargée des embruns du large. Mais si cette nouvelle exploration, que Rosemary Standley mène avec des musiciens qui viennent du baroque, commence bien avec Purcell, elle se poursuit, au-delà de l’océan, sur les rivages et les terres du folk, dessinant un itinéraire musical étonnant, où des mélodies que plusieurs siècles séparent semblent contemporaines. Ce serait un peu comme si Marilyn, dans La Rivière sans retour, se mettait tout naturellement, descendue de son radeau, à entonner une chanson de l’époque de Shakespeare—pourquoi pas un de ses sonnets mis en musique !—, ou comme si ces musiciens avaient voyagé sur le vieux galion retrouvé échoué au milieu de la jungle, perché sur les grands arbres, dans Cent ans de solitude. De solitude il est souvent question, dans ces chansons, d’amours empêchées, impossibles, disparues, sans que ce soit toujours pour autant une souffrance : il y a aussi l’attente, heureuse, l’espoir, la gaieté et la légèreté d’un premier baiser. « Obéir à l’amour », comme une injonction à la fois belle et grave, où la fatalité et le plaisir se rencontrent, mais aussi le narcissisme rêveur et l’oubli de soi. Ces fragments d’un état amoureux, Rosemary et ses musiciens les font entendre ; il revient au metteur en scène de les accompagner, de jouer avec les couleurs et les gestes qui sont déjà là, d’attraper au vol quelques mots, qui comptent peut-être un peu plus que les autres, pour les faire résonner sur la scène, au cœur de ce poème qui donne envie d’aimer. Sans prétendre construire absolument un récit, le travail scénique accompagne néanmoins Rosemary et ses musiciens dans l’exploration d’un monde à la fois familier et fantastique, parfois grave, où chacun est hanté par des souvenirs et des désirs qui affleurent au fil du spectacle. Au début, ils arrivent lentement, ils arrivent de loin, peut-être pour un enterrement, quelque chose d’exceptionnel qui les réunit dans une mélancolie commune, ils se regroupent assez religieusement autour d’une petite lumière, dans un coin de la scène et Rose chante une première chanson, comme une prière, sanglée dans un grand imperméable et accompagnée seulement par Bruno à la guitare. Il y a du silence, des silhouettes qui passent, et puis il y a Elisabeth, l’autre femme, peut-être la sœur de Rose, qui décide d’aller s’asseoir derrière un clavecin que l’on découvre et qui commence à jouer, toute seule, pour elle, et avec cette musique la vie reprend, peu à peu, et la scène va se transformer : une toile peinte descend lentement, évoquant une forêt, un paysage de nouveau monde, une toile peinte comme on n’en voit plus, une qui a beaucoup servi, que l’on aurait utilisée dans un tout petit opéra ou même dans un saloon… Quelques meubles, les musiciens qui accompagnent et ne quittent pas des yeux ces deux femmes dont on va deviner à peine l’histoire mais continuer à se demander d’où elles viennent et où elles vont : leurs robes évoquent à la fois l’Empire, les îles de Joséphine, mais peut-être aussi l’Amérique des années 1950…