Encor sur le pavé sonne mon pas nocturne

D’après la correspondance de Marcel Proust et Reynaldo Hahn

Encor sur le pavé sonne mon pas nocturne

D’après la correspondance
entre Marcel Proust et Reynaldo Hahn

Production de l’Académie du Festival d’Aix-en-Provence, avec le soutien de la Fondation d’entreprise La Poste.

Durée 1h

Spectacle présenté le 7 décembre 2014 à la Fondation de Monaco, Cité internationale universitaire de Paris, le 9 décembre 2014 à l’auditorium du Groupe La Poste, Paris, puis dans le cadre du Festival d’Aix-en-Provence, les 29 et 30 juin 2015 (jardins de la Sacem, Aix-en-Provence), le 2 juillet 2015 dans le cadre du Festival de la correspondance de Grignan (Collégiale), le 16 juillet 2016 dans les Carrières de lumières des Baux-de-Provence, le 2 février 2023 au Teatre-Auditori de San Cugat dans le cadre du Lied Festival  Victoria de Los Ángeles, Barcelone.

Création

Conception et mise en scène : Vincent Huguet
Costumes : Clémence Pernoud
Lumières : Bertrand Guittard

Distribution

Françoise Fabian, actrice
Julie Moulier, actrice
Norma Nahoun, soprano
Benjamin Laurent : direction musicale et piano

 

Reprise au Lied Festival Victoria de Los Ángeles,

Barcelone, le 2 février 2023

Dame Felicity Lott
Mercedes Gancedo
Irene Mas Salom
Piano: Julius Drake

 

Avec les chansons de Reynaldo Hahn :

Offrande (1891) sur un poème de Paul Verlaine
Encor sur le pavé sonne mon pas nocturne (1901) sur un poème de Jean Moréas extrait des Feuilles Blessées
L’Heure exquise (1893) sur un poème de Paul Verlaine extrait des Chansons grises
Nocturne (1893) sur un poème de Jean Lahor
Dans la nuit (1904) sur un poème de Jean Moréas extrait des Feuilles Blessées
Quand la nuit n’est pas étoilée (1900) sur un poème de Victor Hugo
Rêverie (ca. 1888) sur un poème de Victor Hugo
A Chloris (1916) sur un poème de Théophile de Viau

ainsi que L’Énamourée et Si mes vers avaient des ailes à Barcelone

Photos : © Laurent La Rosa © Joao Garcia pour les photos dans les Carrières des Baux-de-Provence

Note sur la mise en scène
par Vincent Huguet

Avant le « temps perdu »

Un soir en décembre, à Paris, il est tard, une femme rentre chez elle ; elle a passé la soirée à l’opéra ou au théâtre. Ses pas dans l’appartement ne réveillent pas un jeune homme endormi là, au milieu de piles de partitions, et pas loin d’un grand piano : on est dans une famille de musiciens. Il est tard, mais elle n’a pas envie d’aller se coucher, elle se sert un verre, elle finit par réveiller ce jeune homme, son petit-fils, sans doute, et voilà qu’on entend bientôt des rires, des pas précipités et titubants dans le couloir, ceux de deux jeunes femmes—en fleurs— qui rentrent d’une soirée et qui elles non plus n’ont pas sommeil. Un dernier verre, l’appel de la musique, l’un qui se met au piano et l’autre qui ressort des vieux papiers ; il n’en faut pas plus pour que les souvenirs s’invitent à leur tour dans ce salon. De Reynaldo Hahn, ils ont hérité l’amour de la musique, mais aussi les lettres que Marcel Proust lui envoyait avec assiduité à partir de leur rencontre, en 1894, alors que l’un est alors un musicien déjà reconnu et l’autre un écrivain qui se cherche. Comme d’autres se lanceraient avec excitation dans une séance de spiritisme, ces quatre-là se plongent dans les mots de l’un et la musique de l’autre et y trouvent la fièvre des premiers jours, l’attente insupportable, l’émerveillement, les doutes et l’exaltation, bientôt aussi, la tristesse. « On est toujours bien inspiré quand on parle de ce qu’on aime. La vérité est qu’on ne devrait jamais parler que de cela. », écrit Proust à Hahn, qui dans ses mélodies ne dit pas le contraire : les deux jeunes hommes semblent alors guidés par la même recherche, qui n’est pas encore celle du « temps perdu » mais celle du sentiment, avec une obsession : essayer de l’attraper. Au cours de la soirée, chacun recevra à sa façon les échos de cette correspondance littéraire et musicale, mais surtout amoureuse : l’une avec nostalgie, l’autre avec impatience, l’autre encore avec inquiétude, troublée de reconnaître ses propres doutes dans ceux exprimés par Marcel. Quant au piano, véritable maître des lieux, il fera entendre avec de plus en plus de clarté sa « petite phrase », souvenir lointain de celle qui avait rendu Swann si heureux avant de le torturer et qui revient le temps d’une nuit s’imposer comme un hymne amoureux.